La sorcière, entre objet historique et icône féministe Regards scientifiques sur l’utilisation d’une figure fascinante

Appel à communication

Argumentaire

Cette figure est utilisée de façon récurrente dans de nombreux espaces géographiques et se décline sous des aspects très différents selon les époques et les cultures, exerçant une fascination qui attire souvent les regards de façon irrésistible, qui subjugue par ses aspects aguichants ou qui peut paralyser le recul et la critique nécessaires à une étude prudente et approfondie.

La question de la définition de la sorcière est essentielle pour recenser la diversité des cas présents dans le temps et l’espace. La sorcellerie ne se décline pas qu’au féminin, comme la présence d’hommes l’atteste dans des proportions variables selon les régions (80% en Normandie à l’époque moderne). Le nombre de cas est un sujet continuellement révisé au vu des archives nouvellement exploitées, et également débattu suivant les interprétations ou extrapolations parfois exagérées pour étayer des thèses allant jusqu’à la manipulation. La célèbre militante écoféministe américaine qui se revendique sorcière, Starhawk, avance le chiffre de 9 millions de condamnations.

Se pose alors la question de la légitimité à utiliser la figure de la sorcière. Les acteurs et actrices d’un militantisme contemporain s’affichant par exemple comme wicca ou éco-féministes, entre autres mouvements très nombreux, prônent la réhabilitation des cas historiques judiciaires, et présentent la chasse aux sorcières comme un modèle absolu de féminicide. L’Ecosse et la Catalogne ont officiellement réhabilité en 2022 des milliers d’accusées avec une forte publicité médiatique. Que signifient les demandes actuelles de réhabilitation d’accusées dont la mort remonte pour certains à un demi-millénaire ?

Ce sujet dans l’air du temps fait état d’une récupération par des non-experts (journalistes, écrivain(e)s, influenceuses, « magiciennes » professionnelles – tireuse de cartes, « witch » avec un don de voyance, d’ensorcellement…) qui peuvent être animés par des objectifs mercantiles ou par un gain de notoriété. Une certaine confusion des genres peut parfois même se rencontrer au sein de la recherche universitaire. L’exemple de Jules Michelet qui a forgé dès 1862 l’image fantasmée d’une sorcière rebelle qui lutterait avec des desseins féministes avant la lettre, montre la persistance de cette interprétation qui érige la sorcière en symbole de revendications parfois anachroniques. Les chercheurs faisant preuve d’expertise et de compétences méthodologiques pour étudier un fait historique sont-ils les seuls aptes à pouvoir produire une analyse et une interprétation du phénomène ? Quelles sont les conditions nécessaires pour faire autorité en la matière ?

Cette journée d’études propose d’interroger avec un regard universitaire multidirectionnel la validité des arguments présentés pour démontrer que la sorcière est une icone féministe. Les éclairages scientifiques et historiographiques pourront mettre en lumière un débat d’actualité grand public souvent très polarisé autour d’une figure qui fascine de façon quasi systématique. La sorcière interroge ainsi les chercheurs de disciplines aussi variées que l’histoire, l’histoire de l’art, la théologie, la philosophie, la psychologie, la sociologie, l’ethnologie, l’anthropologie, les sciences de l’information et de la communication ou la littérature, sans être exhaustif.

La réflexion interdisciplinaire portera sur un espace géographique étendu à l'aire d'influence de mouvements féministes actuels œuvrant à l’échelle local ou mondial, incluant l’ensemble des espaces européens, américains, africains, asiatiques et océaniens, et sur un temps large qui englobe les quatre périodes historiques.

La journée d'études est organisée par l’UMR 3400 – ARCHE de l’Université de Strasbourg.

Elle se déroulera le vendredi 2 juin à l'Université de Strasbourg dans la salle de conférence de la MISHA et en visioconférence.

 

Modalités de contributions

Le format des communications est limité à 10 - 15 mn par intervenant pour permettre de plus longs moments de discussions qui pourront nourrir la future publication.

Les propositions de communication avec un résumé d’une page maximum et un CV biobibliographique de 5 lignes sont à envoyer à maryse.simon@unistra.fr

pour le 1er avril 2023.

 

Comité scientifique

Maryse SIMON, Antoine FOLLAIN et Clémence VIAL-DETAMBEL (ARCHE – UMR 3400)

 

Lieux

  • MISHA - Maison Interuniversitaire des Sciences de l'Homme - Alsace, Salle de Conférence - 5, allée du Général Rouvillois
    Strasbourg, France (67)