Présentation
Les sources sont au cœur, c'est une évidence, du travail de l'historien. Mais si tous les historiens utilisent, exploitent, analysent des sources, peu, en revanche, se livrent au travail préalable : celui de recherche, d'édition, d'inventaire, de critique de ces sources ; celui, en fait, qui permet aux historiens d'utiliser des sources en connaissance de cause, en disposant d'un accès à la source, en en connaissant la date, la valeur, le contexte...
Ce travail a longtemps été rejeté par une recherche universitaire qui y voyait une érudition lourde et peu inventive qu'elle laissait volontiers à d'autres. À l'équipe ARCHE, nous considérons que ce travail est indispensable au progrès des études historiques, tant il subsiste encore, malgré des siècles d'activité intense, des sources inédites ou mal éditées, peu ou mal datées, insuffisamment critiquées, difficiles d'accès... Une part non négligeable de nos recherches y est consacrée, non seulement sous la forme de projets individuels, mais également sous forme de travaux collectifs.
Le travail sur les sources permet d'ailleurs de toucher à de nombreux domaines des sciences historiques, et d'être toujours à l'écoute des inflexions de notre discipline.
Cet axe était déjà présent dans l'actuel quadriennal, comme axe 3, intitulé « sources ». Enrichir son nom et le faire passer en axe 1 n'est pas un simple jeu. Il s'agit d'affirmer le caractère premier de ce travail sur les sources. Il s'agit aussi de souligner que ce travail est lié à des questions de méthode et que, placé dans la continuité de plusieurs siècles de travail érudit, il est lié à la question du savoir. Il est d'ailleurs indispensable de connaître la matérialité des vecteurs de savoir pour tenter de dégager les usages des manuscrits, des livres, des cartes, etc.
Car non seulement nous avons voulu maintenir cet axe, mais nous avons voulu le renforcer et l'élargir. À la mise en valeur des sources telle que nous la pratiquions et pratiquerons, nous avons voulu ajouter des questions, au sens propre, fondamentales : comment pouvons-nous améliorer notre connaissance des sources utiles pour nos recherches ? Quelles méthodes nouvelles pouvons-nous mettre au point pour améliorer l'exploitation de ces sources ?
Et cela nous a conduits à nous interroger aussi sur les « savoirs », c'est-à-dire en fait sur les connaissances, au sens le plus large, des auteurs et rédacteurs des sources que nous utilisons.
Si les chercheurs d'ARCHE connaissent parfaitement les thématiques à la pointe de la recherche actuelle, ils sont aussi conscients de la nécessité, pour l'étude du passé comme pour d'autres sciences, de la nécessité d'une recherche fondamentale. Dans notre discipline, celle-ci concerne l'édition, l'inventaire, la valorisation, la traduction... des sources. Le médiéviste, le moderniste en particulier le savent : ce genre de publications reste d'actualité pendant longtemps.
Mais le premier fondement d'un tel projet est la réflexion même sur les sources. C'est en ce sens que les historiens d'art de l'unité proposent d'interroger la manière dont les œuvres d'art, au sens le plus large, peuvent être des sources d'histoire.
La tradition médiéviste de travail sur les sources sera fortement représentée, mais d'autres travaux porteront sur l'époque moderne, notamment en lien avec la question des savoirs.
Nous aurons de très nombreux projets d'éditions scientifiques de textes anciens ou récents, jusqu'au XXe siècle.
Les sources textuelles ne seront pas les seules à bénéficier de cette attention. D'autres projets porteront sur les dessins d'architecture ou les dessins d'illustration.
Les recueils ou corpus seront à l'honneur. Car ils sont l'occasion à la fois de faire connaître des documents souvent peu connus ou trop dispersés, et de se livrer à une réflexion plus globale sur un sujet donné.
Des traductions sont également prévues, en général dans le cadre de projets d'éditions ou de corpus. La faiblesse de la connaissance des langues, en particulier des langues anciennes, rend indispensable la mise à disposition des étudiants, d'un public cultivé, voire parfois même des collègues, de sources qui, pour la période médiévale en particulier, ne sont souvent accessibles qu'aux latinistes. Ce travail de traduction peut à juste titre être considéré comme relevant de la vulgarisation, puisqu'au sens propre il s'agit de traduire, on pourrait dire de conduire, des textes latins en langue vulgaire. Mais il s'agit également d'un vrai travail de recherche : la traduction oblige à consacrer à un texte une attention très soutenue, à en comprendre tous les éléments, à en mettre en lumière les ambiguïtés : le travail de traduction est d'abord utile à ceux qui le font. C'est bien pour cela que nous n'hésitons pas à le considérer comme un travail de recherche.
La production de ces outils traditionnels ne signifie cependant en rien que nous négligeons les possibilités offertes par les TIC. Forts d'une déjà longue expérience en la matière (projets ANR HistCarto et Espachar), nous continuerons le développement de bases de données, notamment de textes diplomatiques.