Conférence organisée dans le cadre du Programme doctoral international du Collège doctoral européen
Durant la Grande Guerre, le Roi de Wurtemberg déclare, au sujet de l’Alsace-Lorraine : « Cet os-là ne sera la proie de personne ! ». Pendant que le conflit mondial fait rage, l’avenir du territoire annexé par l’Empire allemand à la suite de la guerre franco-prussienne reste des plus incertains. Symbole de la puissance du Reich avant de devenir le principal but de
guerre français, l’Alsace-Lorraine forme, depuis 1871, le Reichsland Elsass-Lothringen. Cette « Terre d’Empire » se caractérise par une identité singulière, notamment en matière juridique : s’y côtoient des règles de source française, allemande, mais aussi alsacienne-lorraine. À partir de novembre 1918, dans ses « provinces délivrées », la République victorieuse doit donc affronter une complexe coexistence des droits. Dans un contexte politique tendu, la désannexion et la réintroduction du droit
commun français révèlent rapidement leur difficulté, finissant par entraîner la formalisation progressive d’un droit local alsacien-mosellan dans l’ordre juridique national. Le parcours du jeune Robert Schuman est symbolique de cette histoire à la fois riche et troublée : né Allemand d’un père mosellan et d’une mère luxembourgeoise, il étudie le droit dans les Universités du Reich jusqu’en 1910, puis débute sa carrière d’avocat à Metz. Après-guerre, il entre à la Chambre des députés française, en tant qu’élu de la Moselle recouvrée. Dans la « Chambre Bleu horizon », il œuvre pour le maintien de particularismes juridiques locaux, tant en matière civile et commerciale que scolaire et cultuelle. À ce titre, il semble que « l’homme des frontières », futur Père de l’Europe, soit également l’un des pionniers du droit particulier de l’Alsace-Moselle, qui figure aujourd’hui parmi les Principes fondamentaux reconnus par les lois de la République.
intervenants
François Igersheim, Professeur émérite de l'Université de Strasbourg
Christian Pennera, Ancien jurisconsulte du Parlement européen
Emilien Rhinn, Docteur en histoire du droit
organisation
Anaïs Nagel (doctorante, EA3400)
Sophie Kraemer (doctorante, EA 1351)